Cette interpellation a été déposée le 07.05.2015. Soutenue par au moins 5 Conseillers communaux, elle a été transmise à la Municipalité pour réponse.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Dans les communications de la Municipalité de Chavannes-près-Renens adressées au Conseil communal lors de sa séance du jeudi 26.03.2015, notre Syndic, André Gorgerat, a annoncé que la commune de Chavannes-près-Renens, notre commune, avait obtenu de l’Etat de Vaud le statut de « commune touristique ».
On lit effectivement dans la Feuille des Avis Officiels du 24.02.2015 (FAO n° 16) que le Conseil d’Etat, par décision du 18.02.2015, octroie à la commune de Chavannes-près-Renens le statut de commune touristique à compter du 01.03.2015.
Ensuite, dans un article du journal « 24 Heures » paru le 13.04.2015, on apprend que la Municipalité, selon les déclarations de notre syndic, a déposé « cette demande pour que les promoteurs du futur quartier des Cèdres puissent vendre des appartements à des étrangers ». Il s’agirait « d’une trentaine de logements, pas plus » et « de tourisme d’affaires, pas de loisir ». La demande aurait aussi « un lien avec la présence de l’UNIL et de l’EPFL ».
Dans le même article, on lit en outre que notre Syndic aurait ajouté « qu’il n’est pas question d’ouvertures prolongées des magasins à Chavannes sous prétexte de zone touristique ».
Si le soussigné est fier de sa commune, et qu’il est de l’avis que celle-ci mériterait certainement d’être visitée par tout un chacun, force est quand même de constater que notre commune n’a, pour le moment, pas grand-chose d’une véritable commune touristique au sens où le touriste moyen pourrait concevoir une commune comme destination touristique…
Certes notre commune accueille des centaines d’étudiant-e-s en raison de la présence de l’UNIL sur son territoire et de la proximité de l’EPFL, et la majorité de sa population est d’origine étrangère avec plus de 100 nationalités représentées. Mais la commune de Chavannes-près-Renens ne dispose d’aucun hôtel et d’aucune attraction susceptible d’attirer de nombreux touristes.
Le soussigné s’interroge donc sur les motivations exactes qui ont poussé la Municipalité à demander au Conseil d’Etat l’attribution du statut de « commune touristique » à sa commune d’enfance et de résidence.
Le soussigné s’interroge aussi bien évidemment grandement sur les conséquences de ce nouveau statut pour la population chavannoise et environnante.
En effet, au vu des différents plans de quartier en cours de réalisation sur le territoire de Chavannes-près-Renens, notamment le plan de quartier des Cèdres, lequel contient entre autres des PPE et une tour d’une hauteur de 117 m qui devrait manifestement accueillir une ou plusieurs grandes entreprises, vraisemblablement étrangères, on peut se demander quelles sont les potentielles conséquences que ce statut pourrait avoir à la fois sur le nombre de résidences secondaires dans la commune, et sur le marché local du logement, en particulier les prix et les loyers des habitations, notamment les appartements, cela tant sur la commune que dans la région.
Car si des entreprises, en particulier étrangères, prennent place dans la futur tour du quartier des Cèdres, il y a fort à parier que celles-ci s’installeront dans cette tour avec leur propre personnel, vraisemblablement délocalisé d’un autre lieu de travail situé à l’étranger. Ce personnel devra forcément pouvoir se loger dans la région et cela accentuera la pression sur le marché du logement vaudois, déjà extrêmement tendu. Corollaire de l’accentuation de la pression sur ce marché extrêmement tendu, les hausses des prix des loyers et des logements seront inévitables (principe de l’offre et de la demande).
Ajouté à cela le fait de permettre à des étrangers en résidence secondaire de pouvoir acheter un logement, la pression à la hausse des prix ne pourra que s’accentuer.
Or les familles vaudoises peinent aujourd’hui à trouver des logements à des prix abordables, et on peut donc s’interroger sur l’opportunité d’octroyer à des personnes étrangères la possibilité d’acheter des logements en résidence secondaire sur notre commune.
Cela va aussi clairement à l’encontre des arguments tant des promoteurs du plan de quartier des Cèdres, Messieurs Bernard Nicod et Avni Orlatti, que de la Municipalité, lesquels ont avancé tout au long de la campagne du référendum contre ce plan de quartier, que le but était d’offrir, outre un cœur à Chavannes, des possibilités de logement à des prix corrects tout en permettant une certaine mixité sociale et une mixité des activités économiques, les deux associées à une possibilité de hausse intéressante des rentrées fiscales pour la commune.
La Municipalité et les promoteurs du plan de quartier des Cèdres n’ont d’ailleurs jamais fait mention à une seule reprise pendant la campagne du référendum de la possibilité de demander le statut de commune touristique pour notre commune, pas plus que de viser une clientèle de résidants secondaires pour ce plan de quartier.
Enfin, le soussigné s’interroge aussi sur les contradictions évidentes qui entourent la demande de ce statut dès lors que la Municipalité a souvent répété vouloir, notamment pour les étudiants, que ses futurs résidents se déclarent en résidence principale sur la commune, notamment pour des aspects fiscaux et de péréquation cantonale. Le quartier des Cèdres ferait-il exception à la règle ?
Aussi je pose les questions suivantes à la Municipalité.
- La Municipalité peut-t-elle expliquer au Conseil communal quelles sont les motivations qui l’ont conduite à transmettre au Conseil d’Etat une demande d’octroi de statut de « commune touristique » consécutivement à une demande des promoteurs du plan de quartier des Cèdres ?
- Le statut de « commune touristique » octroyé par le Conseil d’Etat s’applique-t-il juridiquement à l’ensemble de la commune, ou exclusivement au périmètre du plan de quartier des Cèdres ?
- La Municipalité a-t-elle réellement préalablement discuté avec l’EPFL et l’UNIL de sa démarche visant à l’octroi du statut de commune touristique ?
- Concernant le plan de quartier des Cèdres, le nombre de logements pouvant être vendus à des étrangers en résidence secondaire sur la commune est-il de 30 logements au total, ou de 30 logements par année ? Si c’est par année, sur combien d’années la Municipalité entend-t-elle demander un quota de vente à l’autorité cantonale ?
- Quel est le nombre actuel de résidences secondaires à Chavannes-près-Renens et quel impact le nouveau statut de commune touristique aura-t-il sur l’évolution de ce nombre ces prochaines années ?
- De l’avis de la Municipalité et, cas échéant, des autorités cantonales, quel sera l’impact probable de ce nouveau statut sur le niveau des prix et des loyers sur l’ensemble de la commune et, par extension, dans les communes avoisinantes ?
- La Municipalité peut-elle encore nous garantir aujourd’hui que les prix et les loyers des appartements à disposition dans le quartier des Cèdres s’inscriront dans une gamme de prix abordables, et qu’ils permettront la mixité sociale prônée auprès de la population lors de la campagne du référendum ?
- La Municipalité confirme-t-elle que les commerces chavannois ne bénéficieront pas d’horaires touristiques étendus à l’avenir ?
- A combien de pertes fiscales la Municipalité estime-t-elle le fait de vendre des appartements à des personnes étrangères en résidence secondaire plutôt qu’à des résidents en résidence principale ?
- Qu’est-ce que la Municipalité entend par « tourisme d’affaires » concernant les potentiels acheteurs étrangers visés par la demande d’octroi de ce nouveau statut ?
- Pourquoi la Municipalité n’a-t-elle jamais fait mention, avant l’acceptation par la population du plan de quartier des Cèdres, de la possibilité de viser une clientèle d’affaires étrangère en résidence secondaire ? S’agit-il d’une modification de stratégie ? La Municipalité nous a-t-elle tout dit ?
- La Municipalité juge-t-elle réellement opportun au développement et à l’image de la commune de Chavannes-près-Renens, notamment eu égard à la difficulté pour les familles vaudoises de trouver des appartements à loyer abordable, la vente d’appartements en résidence secondaire à des personnes aux revenus vraisemblablement appréciables et qui ne seront pas là en permanence ?
- Comment la Municipalité compte-t-elle, à l’avenir, motiver les étudiants à s’installer en résidence principale à Chavannes-près-Renens alors que, dans le même temps, elle permet de fait l’installation d’habitants en résidence secondaire ?
Chavannes-près-Renens, 07.05.2015
Alexandre RYDLO, Conseiller communal socialiste