Interpellation déposée par Alexandre Rydlo lors de la séance du Grand Conseil du 20.11.2012
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
En 2009, les étudiants des EPF s’étaient mobilisés pour s’opposer à la volonté des EPF de
vouloir doubler les taxes d’études. Alors que certains parlaient de s’inspirer du modèle élitiste américain pour donner encore plus de prestige aux EPF, la réalité aurait été tout simplement une perte de l’égalité des chances dans l’accès aux études polytechniques. Au final, face à la très forte mobilisation des étudiants, le projet avait été retiré.
Or, aujourd’hui, les EPF ont de nouveau pour projet d’augmenter les taxes d’études. D’ici
2016, celles-ci passeraient à l’EPFL de 633 CHF par semestre à 1250 CHF par semestre, soit 2500 CHF par an.
Pour justifier ce projet, la direction de l’EPFL prévoit qu’un tiers de l’argent ainsi récolté
servirait au soutien social des étudiants, mais seul une fraction de ce tiers serait réellement
reversée sous forme de bourses. Sans compter que l’argent récolté ne serait pas suffisant pour couvrir l’augmentation des besoins en bourses, et que les critères d’attribution des bourses élimineraient immédiatement bon nombre d’étudiants.
Par conséquent, si les EPF augmentent leurs taxes, les demandes de bourses auprès des
cantons exploseront.
En effet, si cette augmentation devait devenir une réalité, un sondage réalisé en juin/juillet
2012 par l’association des étudiants de l’EPFL, l’AGEPoly, et rempli par quelque 2176
étudiants, révèle que 43.7% des étudiants suisses, 74.6% des ressortissants hors UE et environ 45% de ceux de l’UE auraient besoin d’une bourse si de telles taxes étaient appliquées. Par conséquent, les études dans les EPF se limiteraient à des étudiants très doués, très aisés, ou alors très endettés.
Par ailleurs, si la Direction de l’EPFL justifie cette augmentation par la nécessité urgente
d’obtenir, je cite, « des moyens supplémentaires pour renforcer le corps enseignant, et étendre l’infrastructure, tels que les salles de travaux pratiques, d’exercices et les places de travail pour les étudiants », l’on peut se demander quels sont les réels motifs qui poussent l’EPFL à proposer une telle augmentation des taxes d’études. Car si l’on analyse son budget 2011, lequel s’élève à 790 millions de francs, le gain ainsi réalisé sur ses quelques 6’200 étudiants en 2011 s’élèverait à seulement 7.75 millions de francs. Ainsi, l’argent récolté ne représenterait que 0.98% de son budget annuel et cela, alors même que l’EPFL ne semble avoir aucun mal à rassembler les fonds nécessaires pour construire de nouveaux bâtiments très onéreux qui n’ont pas de lien direct avec l’éducation, comme par exemple « Under One Roof » pour citer l’exemple le plus récent.
Le droit à l’éducation est un droit primordial qui, dans ce cas, est malheureusement en train de devenir un privilège. Mis à part quelques chanceux qui auront le droit à une bourse, les étudiants plus modestes ne pourront plus prétendre aux formations EPF. La population des EPF en 2016 se résumera donc à des jeunes de classe sociale élevée, ou, comme c’est déjà le cas aux USA et en Angleterre, à de jeunes étudiants endettés et qui travaillent durement pour financer leurs études.
Où est l’égalité des chances ? Veut-on troquer l’égalité des chances et la diversité estudiantine pour le prestige ?
Le conseil des EPF décidera ou non d’augmenter les taxes d’études les 5 et 6 décembre 2012.
Aussi je pose les questions suivantes au Conseil d’Etat.
- Le Conseil d’Etat est-il au courant du projet des EPF d’augmenter les taxes d’études ?
- Le Conseil d’Etat a-t-il été éventuellement associé aux réflexions menant à l’augmentation des taxes d’études pour l’EPFL et en particulier aux conséquences de cette augmentation ?
- Le Conseil d’Etat a-t-il mesuré l’ampleur de l’impact sur le budget et le travail de l’OCBE d’une augmentation des taxes d’études pour les EPF ?
- De manière plus générale, quels sont les moyens que le Conseil d’Etat entend mettre en
- place pour lutter contre cette augmentation des taxes dès lors qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’un transfert caché des charges de la Confédération aux cantons sur le dos des plus défavorisés ?
Développement souhaité
Chavannes-près-Renens, 19.11.2012
Alexandre RYDLO, Député socialiste