Postulat déposé par Alexandre Rydlo au nom des Député-e-s du District de l’Ouest lausannois lors de la séance du Grand Conseil du mardi 15.09.2015
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
1. Historique
Mise en service en 1855 par la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest suisse pour la desserte de la ligne Morges-Renens-Yverdon, première voie ferrée de Suisse romande, la gare de Renens n’a cessé de se développer et d’être intimement liée au développement de Renens et de l’Ouest lausannois.
Suivant l’essor du chemin de fer à la fin du 19ème siècle, tant pour le transport des personnes que celui des marchandises, la gare de Renens est agrandie en 1876 avec un important faisceau de voies de triage.
Cet aménagement transforme la gare de Renens en un élément important de l’infrastructure ferroviaire de l’époque, et celle-ci est dotée dès l’année suivante, soit en 1877, d’un important bâtiment pour les voyageurs, bâtiment qui subsiste encore aujourd’hui dans sa forme quasiment originale, précisément de 1908 pour les dernières transformations.
Reprise en 1890 par la toute nouvelle Compagnie des chemins de fer du Jura Simplon, puis en 1902 par les Chemins de fer fédéraux (CFF) lors de la nationalisation des différents chemins de fer de Suisse, la gare de Renens continue ensuite d’être régulièrement transformée au gré de l’évolution du réseau ferré suisse et de l’évolution démographique de l’Ouest lausannois.
On peut citer en particulier son électrification totale en 1925, son équipement avec la première génération d’installations de sécurité électromécaniques dans les années cinquante, et une légère modernisation de l’infrastructure pour les voyageurs à l’occasion de la mise en service du TSOL (métro m1) en 1990. Fait particulier, la gare de Renens a aussi été bombardée par erreur par les Forces alliées en juin 1940, pendant la Deuxième Guerre mondiale.
En parallèle, l’infrastructure ferroviaire de la gare de Renens a bien évidemment été entretenue de manière continue par les CFF. Les voies, les appareils de voies, la ligne de contact et la signalisation ont ainsi été renouvelés et adaptés à intervalles réguliers, permettant aujourd’hui le passage des trains à deux étages, mais aussi l’arrêt de trains de 300 m de longueur.
2. Constat actuel et transformation de la gare
Cela dit, si l’infrastructure ferroviaire a été adaptée de manière continue, les infrastructures d’accueil pour permettre la montée et la descente des passagers n’ont que peu évolué avec le temps. Aujourd’hui, la gare de Renens n’est ainsi dotée que d’un seul et petit passage sous-voies, d’ailleurs lugubre, et chacun de ses quais n’est accessible que par un seul et unique escalier très étroit. Les quais sont par ailleurs extrêmement étroits aussi et, aux heures de pointe, mais aussi de plus en plus régulièrement en dehors des heures de pointe, les escaliers d’accès comme le passage sous-voie n’arrivent plus à absorber le flux de passagers qui montent et qui descendent des trains. Cette saturation est d’autant plus évidente le matin et le soir, lorsque les pendulaires et les étudiants des hautes écoles arrivent et repartent, la gare de Renens et le métro m1 étant le moyen le plus rapide pour rejoindre le campus universitaire. A ces heures, il est impossible d’accéder aux quais dans le sens contraire du flux de voyageurs descendant sans forcer le passage.
A noter par ailleurs que les personnes à mobilité réduite doivent emprunter sous contrôle du personnel CFF les passages à niveau de service, cela alors que la gare est traversée chaque jour par environ 600 trains voyageurs et marchandises.
On doit toutefois relever ici que si la gare de Renens n’était fréquentée que par quelques milliers de personnes chaque jour jusqu’à la fin des années huitante, l’arrivée du TSOL et le développement démographique de l’Ouest lausannois et des hautes écoles – EPFL, UNIL et ECAL – de même que, et de manière plus générale, le développement aussi de tout l’Arc lémanique, ont amené la gare de Renens a être fréquentée aujourd’hui par quelques 30’000 voyageurs quotidiennement, ce qui en fait la troisième gare de Suisse romande, derrière celles de Lausanne (100’000 voyageurs/jour) et de Genève (65’000), voire la quatrième si on compte celle de Bienne/Biel comme romande (45’000).
A la lumière de ce constat, soit des infrastructures pour les voyageurs désuètes et une augmentation impressionnante et continue du nombre de voyageurs, et ajouté à ce constat la volonté cantonale de développer toujours plus les transports publics, les quatre communes riveraines de la gare, soit Renens, Chavannes-près-Renens, Crissier et Ecublens, ont mené dès 2003 un projet de rénovation, dans le cadre du Schéma Directeur de l’Ouest lausannois, qui a amené les CFF, en partenariat avec le Canton de Vaud, à prévoir de moderniser entièrement la gare de Renens.
Cette modernisation s’inscrit dans le cadre des gigantesques travaux « Léman 2030 », lesquels ont pour but de doubler la capacité de transport de voyageurs par train entre Lausanne et Genève à l’horizon 2030 pour satisfaire la demande (4ème voie Lausanne-Renens, saut de mouton de Prilly-Renens, tronçons partiels de 3ème voie entre Renens et Genève, agrandissement de la gare de Lausanne, et modernisation de la gare de Genève).
La gare de Renens sera donc entièrement modernisée entre 2016 et 2019. Le passage sous-voie sera déplacé vers l’Est et agrandi, les quais seront prolongés à 420 m de longueur et accessibles par des escaliers, des rampes et des ascenseurs, de même que par une toute nouvelle passerelle en hauteur à l’Ouest des quais, dite « Rayon Vert ». Deux nouveaux bâtiments d’habitation seront aussi construits au Sud-est et au Sud-ouest de la gare et celle-ci disposera de quelques commerces supplémentaires.
Au Nord, la gare sera aussi connectée au futur tramway t1 qui reliera Lausanne et Villars-St-Croix, et au Sud elle sera reliée par un cheminement piétonnier au futur gymnase de l’Ouest lausannois et aux nouveaux bâtiments des CFF situés dans le quartier des entrepôts de Renens. Ces nouveaux bâtiments CFF abriteront les nouveaux bureaux pour les quelques 1500 collaborateurs des différentes directions des CFF pour la Romandie.
Les places Sud et Nord de la gare seront aussi totalement réaménagées, et la gare de Renens se transformera en nœud des transports publics de l’Ouest lausannois. La gare de Renens deviendra ainsi la véritable plaque tournante des transports publics de tout le District de l’Ouest lausannois, un district clairement urbain où les frontières communales s’estompent jour après jour et qui, s’il compte aujourd’hui quelque 70’000 habitants, en comptera 100’000 à l’horizon 2030-2040. En résumé, si la gare de Renens dessert aujourd’hui prioritairement quatre communes, soit Renens, Chavannes-près-Renens, Crissier et Ecublens, lesquelles participent au financement de la part communale des travaux de la gare, la gare de Renens deviendra dans le futur la gare principale de la grande ville qu’est en train de devenir l’Ouest lausannois, ce qui augmentera d’autant plus le nombre d’habitants directement concernés par cette gare.
3. Desserte actuelle et absence de desserte grandes lignes à l’avenir
Si, à l’avenir, la gare de Renens aura tout des infrastructures d’une grande gare, lesquelles permettraient l’arrêt des plus grands trains voyageurs CFF dits de grandes lignes (futurs Twindexx-Duplex Swiss Express de Bombardier en double rame de 400 m de long (2 x 200 m)), il n’est pas prévu dans la planification actuelle des CFF de faire s’arrêter ce type de trains en gare de Renens.
De fait, dans la planification des CFF, la gare de Renens s’est vue reléguer ces dernières années dans l’établissement des horaires comme une simple gare régionale, petite sœur de la grande gare principale de Lausanne, alors même que la gare de Renens dessert aujourd’hui directement un bassin de population de 70’000 habitants et un campus universitaire de 25’000 personnes.
On constate en fait ces dernières années une péjoration de la desserte en trains de grandes lignes qui existait pourtant auparavant avec Genève-Aéroport, Berne ou Sion, très partiellement Neuchâtel, cela totalement à rebours des investissements qui vont être consacrés, et surtout du développement récent de la population utilisant la gare.
C’est ainsi que, pour l’heure, la gare de Renens est desservie presqu’exclusivement par des trains régionaux (S, 179 trains) et des trains Régio-Express (RE, 78 trains). On ne compte que 3 ICN aux heures de pointe le matin, et 10 Inter-Régios (IR), très tôt le matin et tard le soir. Les 3 ICN seront en outre supprimés dès l’horaire 2016 à cause des travaux « Léman 2030 ».
Une simple comparaison avec les 81, 74, 76 et 80 IR qui s’arrêtent quotidiennement à, respectivement, Morges, Nyon, Vevey, et Montreux, les 71 ICN qui s’arrêtent à Yverdon, ou les 60 IR qui s’arrêtent à Oerlikon, quartier de la ville de Zürich, sorte de jumeau du District de l’Ouest lausannois, démontre que la desserte de la gare de Renens en trains grandes lignes n’est de loin pas adéquate pour une gare d’une telle importance (voir tableau 1).
Par ailleurs, au contraire des gares d’Oerlikon ou de Wil SG, lesquelles sont toutes deux reliées deux fois par heure à Zürich-Aéroport, la gare de Renens n’est pas directement connectée à Genève-Aéroport (hormis au milieu de la nuit (!) et tard le soir).
Tableau 1 : Tableau de la desserte des principales gares de Suisse
La gare de Renens n’est ainsi pas directement connectée aux réseaux des trains grandes lignes et à l’aéroport de Genève, mais seulement indirectement via la gare de Lausanne.
Les voyageurs à destination de Genève doivent, soit prendre un RE qui s’arrêtera à 6 arrêts intermédiaires jusqu’à Genève, ou alors passer par Lausanne. Pour Genève-Aéroport, les voyageurs qui partent de Renens devront nécessairement changer à Genève ou à Lausanne. Pour Fribourg ou le Valais, il faudra changer à Lausanne et, pour Yverdon ou Neuchâtel, soit passer par Lausanne pour espérer gagner quelques minutes, soit prendre un train régional.
Dans tous les cas, le parcours des voyageurs de ou à destination de Renens est allongé d’environ 15 minutes, ou sujet aux désagréments d’un transbordement en gare de Genève ou de Lausanne, et les coûts de transport sont aussi plus élevés.
En regard de ce constat technique, du bassin de population du District de l’Ouest lausannois, du nombre de voyageurs qui utilisent chaque jour la gare, et des infrastructures d’importances nationale et cantonale situées dans l’Ouest lausannois, soit l’EPFL, l’UNIL et l’ECAL, plus récemment le SwissTech Convention Center, de même qu’en comparaison avec la desserte d’autres gares sur le plan cantonal et sur le plan national, ce statut de gare régionale pour la gare de Renens n’est clairement plus adapté et choque (voir tableau 1).
Il choque d’autant plus que la population de l’Ouest lausannois augmentera massivement ces prochaines années, soit comme indiqué plus haut 100’000 habitants en 2030-2040, que le campus universitaire s’accroit, et que les CFF auront bientôt à Renens l’ensemble de leurs directions régionales pour la Suisse romande, soit comme indiqué plus haut aussi, quelques 1500 collaborateurs.
Au point qu’une pétition munie de plusieurs milliers de signatures, soutenue tant par l’EPFL que l’UNIL, avait été transmise aux CFF en date du 28.03.2013 pour leur demander de remettre à l’horaire l’arrêt en gare de Renens d’un IR par heure à destination de Genève et Genève-Aéroport, l’arrêt régulier des IR en gare de Renens ayant été supprimé avec l’introduction de l’horaire 2013.
Cette pétition avait d’ailleurs reçu le soutien tant des communes de Renens, Chavannes-près-Renens, Crissier et Ecublens, que du Canton de Vaud, lequel s’était engagé auprès des CFF pour que la gare de Renens ne soit pas oubliée des réflexions et que la question de l’arrêt des IR, au moins aux heures de pointe, soit réétudiée par les CFF.
Or, au moment de commencer les grands travaux du gigantesque chantier « Léman 2030 », il n’existe aucune certitude quant à la réintroduction de l’arrêt des trains grandes lignes en gare de Renens à court, moyen et long termes. A entendre les planificateurs des horaires CFF, on peut même dire qu’il n’existe, à notre connaissance, aucune planification d’horaires allant dans ce sens, contrairement aux engagements publics pris par les CFF suite à une séance commune, organisée à l’initiative des quatre communes porteuses du projet de la gare, et qui avait réuni en janvier 2014 les CFF, le canton, l’EPFL et l’UNIL.
Aussi les Députés de l’Ouest lausannois demandent au Conseil d’Etat, par voie de postulat, de demander aux CFF d’étudier l’arrêt en gare de Renens d’au moins deux trains grandes lignes, dans chaque direction et par heure de service régulier, cela dès que possible mais au plus tard à l’issue des travaux du projet « Léman 2030 ».
District de l’Ouest lausannois, 15.09.2015
Alexandre Rydlo, Député (PS)
Les Députées et Députés de l’Ouest lausannois, cosignataires :
Mireille Aubert, Députée (PS)
Michaël Buffat, Député (UDC)
Sonya Butera, Députée (PS)
Martial De Montmollin, Député (Les Verts)
Olivier Golaz, Député (PLR)
Véronique Hurni, Députée (PLR)
Vincent Keller, Député (La Gauche)
Pascale Manzini, Députée (PS)
Michel Miéville, Député (UDC)
Michele Mossi, Député (PDC)
Stéphane Rezso. Député (PLR)
Myriam Romano-Malagrifa, Députée (PS)
Claudine Wyssa, Députée (PLR)
Développement et renvoi direct au Conseil d’Etat souhaités